Le passage des troupes de Turenne à Saint Jean (3)

 

Edwig.jpgQue n’a-t-on pu lire suite à ce passage des troupes de Turenne. Par exemple qu’elles “ravagèrent complètement l’abbaye”. Autant de faits les plus horribles les uns que les autres. “Des détachements de l’armée du maréchal de Turenne donnèrent aux moines de Saint-Jean un échantillon de leur savoir-faire ; ils pillèrent le couvent, détruisirent une partie des bâtiments réguliers et tout ce qui restait de l’ancien palais de Cuise” écrit Léon Ewig en 1841 dans “Compiègne et ses environs”.

 

En 1842 dans “Compiègne historique et monumental” tome II, Lambert de Ballyhier, à quelques mots près, reprend la même phrase. Louis Grave, dans son précis statistique sur le canton de Compiègne, paru dans l’“Annuaire de l’Oise” édition de 1850, écrit à la rubrique Saint Jean, page 163 “En 1652, un détachement de l’armée du maréchal de Turenne traversant la forêt, mis au pillage le monastère de Saint-Jean, brûla les archives, détruisit une partie des lieux réguliers et démolit ce qui restait de l’ancienne maison royale”.

 

Ophobe.jpgDans le tome II de “La Picardie” 1866, sur Saint Jean aux Bois pages 446 et suivantes, nous retrouvons à peu près le même texte. En 1968, dans son livre “La forêt de Compiègne de la réformation de Colbert à la révolution” Monique Harlé d’Ophove se contente de citer page 184, le texte de Louis Grave.

 

En 1984 dans le bulletin de la Sauvegarde du vieux Compiègne on peut lire page 72 : “… les troupes de Turenne vont complètement ravager l’abbaye en 1652. Les chanoines réguliers, qui venaient pourtant d’adopter la réforme génovéfaine en 1649, sont désormais condamnés à une longue décadence. En 1761, il ne restait plus que trois chanoines et les bâtiments sont en ruines  …”.

 

Dans l’ “Histoire de Compiègne” (1988) il est écrit au chapitre VI page 118 “Après la mort de Louis XIII, en pleins troubles de la Fronde, des gens de guerre logent encore à Compiègne et on doit même lever une taxe pour assurer leur subsistance en 1650. Compiègne reste cependant une “ville royale”, qui a reçu la reine et son fils dès 1649, pendant que l’armée royale stationnait sur la ligne de l’Oise, forcée ensuite par les Espagnols à Chauny. Le danger est proche car on apprend le pillage du couvent de Saint-Jean-aux-Bois”. Nous pourrions continuer cette énumération, mais que nous apporterait-elle de plus ?

 

SauvegardeTous ces textes reprennent l’affirmation de Carlier, sans toutefois apporter d’explica-tions complémentaires qui puissent nous permettre d’ap-préhender ces événements.

 

On peut se demander si la route la plus directe pour aller de Béthisy à la forêt de Retz passait nécessairement par St Jean aux Bois. C’est la première question que l’on se pose.

 

L’autre question consiste à se demander pourquoi, dans leur volonté destructrice, les troupes n’utilisèrent-elles pas le feu, leur meilleur allié, pour ravager les bâtiments, comme elles le faisaient habituellement en d’autres lieux. Or à aucun moment nous ne trouvons dans les archives l’évocation d’un tel fait. Tous ceux qui ont étudié et travaillé sur les bâtiments n’ont évoqué avoir relévé d’anciennes traces d’incendie.

 

Abbé DanguL’abbé Dangu dans son livre “L’abbaye et le village de St Jean aux Bois”, paru en 1911, est plus nuancé sur ces événements. Pages 63 et 64, après la citation du texte de Louis Graves, qui, précise-t-il a été “Commenté et paraphrasé par les compilateurs et sur la gravité duquel nous sommes encore loin d’être éclairé”, il écrit “L’histoire des guerres de la Fronde, les diverses histoires du Vicomte de Turenne sont muettes sur cet événement dont on peut cependant fixer la date exacte vers le mois de juillet ou d’août 1652”. Ayant moi-même recherché dans les mémoires de Turenne quelques notes s’y rapportant, j’aboutis à la même conclusion.

 

Poursuivons la lecture de l’abbé Dangu. “Turenne, dit-il, qui était alors du parti de la cour, commandait les armées royales ; le jeune roi Louis XIV et le parlement venaient d’être transférés à Pontoise ; l’ennemi s’était emparé de Chauny. C’est à ce moment que Turenne marche sur Compiègne pour défendre le passage de la rivière d’Aisne. Il ne semble pas que le prieuré de Saint Jean aux Bois ait éprouvé, à la suite de ce pillage, un désastre irréparable”.

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